La prolifération de la mendicité et la balade des enfants prennent de l’ampleur. Ce phénomène spécifiquement présent à Bamako devient inquiétant.
Dans les rues, sous les ponts, aux feux tricolores, ce sont des lieux où l’on rencontre certains enfants. Ils sont souvent dénoués, avec une restauration malsaine. On les appelle « les enfants de la rue ». Leur situation gène beaucoup. On peut les constater aux feux tricolores de Kalaban-coura sur la route qui mène à l’aéroport. Ils sont nombreux à compromettre leur vie entre les voitures, à la recherche de pitance avec des récipients en main.
Ces enfants sont de part et d’autre des orphelins, des enfants abandonnés par leurs parents et des talibés. Adama et Baba, des talibés venus de Kankan (Guinée Conakry), ont été confiés par leurs parents à un maitre coranique du nom de Chieko DRAME. Sous le soleil brûlant au bord de la rue, ces deux enfants, environs de douze à quatorze ans nous relatent les difficultés qu’ils traversent quotidiennement : « Nous prenons nos quartiers à Yirimadjo (près de 14km de Kalaban-coura, NDLR) Notre maitre “Chieko” nous envoie quémander dans d’autres quartiers durant toute la semaine », nous confie Baba, le plus âgé.
Beaucoup comme Baba et Adama sont exposés de cette manière. Au même carrefour, un petit garçon avec une boîte de concentré de tomates en main, qui sert de sébile, circule entre les usagers. Même si certains lui donnent des jetons, beaucoup hurlent sur l’enfant « de céder le passage ».
Des enfants dans telles situations, est inquiétant. Ils peuvent affronter le danger à tout moment. Ce qui met mal à l’aise aussi certains usagers de la route. « Le sort de ces enfants m’inquiète vraiment, Je me demande pourquoi les parents abandonnent leurs enfants dans la ville. Il fait froid maintenant. D’autres temps, ils sont exposés aux dangers, le soleil brûle fort. Et même si les bandits veulent les kidnapper, on peut dire que la voie est ouverte. C’est vraiment triste », déplore Seydou DIAKITE, chauffeur de camion benne.
Quant aux « enfants de la rue » qui ne sont pas talibés, ils quémandent et essuient les pare brises des voitures pour tenir le fil de la vie. Loin des grandes artères de Bamako, d’autres passent la journée à fouiller dans les dépotoirs d’ordures pour gagner leur pain quotidien. A notre passage près d’un dépotoir sur la colline de Badalabougou, trois garçons ont brisé la glace « nous pouvons gagner de l’argent ici ou même des téléphones mais, on vient pour chercher des objets métalliques pour vendre. Nous ne sommes pas chez nos parents, on dort non loin d’ici », nous raconte un de ces garçons, tout en indiquant du bout des doigts leur dortoir.
Ces enfants que nous avons rencontrés vivotent sans un minimum d’assistance alors que l’ordonnance N°02-06/P-RM du 05 Juin 2002 portant code de protection devrait les couvrir : « tout enfant a droit à un traitement égal en matière de service, de bien ou d’installations, sans discrimination fondée sur la race, le lieu d’origine, la couleur, l’origine sociale, la citoyenneté, la croyance, le sexe, l’âge, l’état matrimonial, l’état familial ou handicap ».
Nous assistons à une violation du droit de ces enfants qui compromettent leur avenir. Et l’État perdure dans son omerta. « Ceci est notre première tâche : prendre soin de nos enfants », a rappelé Barack Obama, l’ancien président américain.
Aboubacar SANGARE